Qui ne connait Bibracte,
notre Beuvray, la montagne sacrée du Morvan ? Au cœur du massif, la haute
citadelle de roc et de forêts embrasse un horizon immense. L’esprit souffle sur
le plateau, dans les ramures des hêtres prophétiques. Comme à Uchon, des forces
mystérieuses jaillissent de cette confluence du ciel et de la terre. Le site a visage de destin.
Mais le Beuvray est aussi un
témoin de l’histoire, car la montagne reste vivante. Si l’on remonte les siècles
jusqu’aux profondeurs du temps, on découvre toujours la présence de l’homme qui
seul donne un sens et une mythologie à la nature
N’était-ce pas l’heure de
rééditer « la Mort de Bibracte, d’Henri Bachelin, ce roman où la fiction
des personnages côtoie la vérité de l’Histoire ?
L’action se déroule cinquante
ans après la conquête. Vercingétorix est mort étranglé dans la prison des bords
du Tibre ; quelques soulèvements ont été noyés dans le sang. La paix
romaine a planté son joug sur la nuque des hommes libres. Deux formes de
civilisations s’affrontent. Face au génie celte héroïque et bavard, enclin au tumulte
et à la discorde, cherchant ses dieux telluriques dans la forêt et la source,
héritier d’une culture orale enseignée par les druides, se dresse le génie de
Rome, froide raison impérialiste, pouvoir centralisateur, créateur de routes,
de viles et de dieux anthropomorphiques taillés dans le marbre.
La Gaule vit encore au sommet
du Beuvray. Ou plutôt elle se perpétue. Bachelin dresse un tableau émouvant d’une
ville crénelée de murs et de portes accueillant jadis dans ses quartiers les
forgerons, orfèvre, émailleurs, commerçants de la nation entière et des pays au-delà
de la mer.
Mais la ruine est proche. Rome
a chassé les artisans, détruit les forges, commencé l’exode d’un peuple.